Merci, merci, merci. C'est vraiment
un bal à l'américaine. Le Noir en premier, direct quoi. Non, ça fait plaisir de voir
autant de monde, là, dehors. Parce qu’il
y a quelque temps, on ne pouvait pas
sortir comme on voulait. En France, il fallait
utiliser une attestation, quoi. Il fallait s'autoriser à sortir. Et l’une des excuses pour
sortir, c'était de promener son chien. Moi, je n’ai
pas d’animaux chez moi. Moi, quand
j’avais envie de sortir, je sortais juste
avec une laisse, tu vois. Et
dès que je me faisais
arrêter par les flics, je disais : “Mais ne vous inquiétez pas,
il est parti en courant, il va revenir”. Et un jour j'ai eu un flic qui a
voulu attendre avec moi, hein. J’étais là : “Fluffy ?
Fluffy t’es où ? Fluffy ?” J'ai inventé un chien, quoi. Fluffy. Je faisais genre
de chercher, tu vois. À un moment,
le flic il me regarde, il dit : “Il n’existe pas Fluffy ?” Je lui dis : “Si, si.” Et au moment où je dis ça, il y a
un chien qui arrive de nulle part, il vient ve
rs moi
et il joue le jeu, tu vois. Je dis :
“Bah voilà Fluffy, voilà.” Là, le flic
comme ça, le flic il part, et le chien, il part aussi. Et je n’ai jamais su
où le chien il était parti. Peut-être qu’il est parti sauver d'autres
menteurs dans le parc, tu vois. Peut-être que
c'est ça son job, quoi. J’ai vu aussi, il n’y a pas très
longtemps, c’était Halloween. Il y avait plein d'enfants
dehors, qui étaient déguisés et tout. Et moi, ce qui
me dégoûte à Halloween c’est tous les adultes
qui
se déguisent, quoi. À un moment, il y en
a un qui a frappé chez moi déguisé en Spiderman, tu vois. Et il me dit : “Ouais,
un bonbon ou un sort ?” Et j'ai vu qu'on
avait le même âge, tu vois. Je fais : “Ecoute mec,
si tu veux des bonbons, va chercher du taf, tu vois.” Et il insiste, il me dit :
“Ouais, des bonbons ou un sort ?” Je dis : “Mec,
je n’ai pas de bonbons.” Il me dit :
“Ouais, mais normalement, les gens qui n’ont pas de
bonbons, ils donnent de l’argent.” Je fais : “Quoi ?” Je sui
s parti chercher un
drap, j’ai fait 2 trous dedans et je l’ai suivi, quoi. On ne s’est pas fait
beaucoup d'argent. Mais par contre, je me
suis fait arrêter par la police parce qu’ils m’ont pris
pour une femme voilée. Vous savez, je m'y connais
un petit peu en enfants, moi. Dans les limites
de la loi, bien sûr. Parce que moi,
avant de faire de la scène j’étais éducateur,
je m'occupais d'enfants. Ouais. J’étais éducateur
dans une maison de vie pour enfants défavorisés. Pour ceux qui ne sav
ent pas ce
que c’est, c’est une maison de vie où l’on accueille des
enfants qui se sont fait recaler des familles d'accueil,
des maisons d'accueil et de chez Pascal
le grand frère, tu vois. Et tu sais, c’est des
enfants très, très difficiles. Tu sais,
c’est leur dernière chance avant d'aller en prison, tu vois. Et leur dernière
chance, bah c’était moi, tu vois. T'imagines,
t’as 12 ans, t’es dans la merde, ta dernière chance, c’est moi ? Tu dis : “Mais c’est sûr
que je vais aller en pris
on, il faut juste
savoir quand c’est, quoi.” Et en vrai de vrai,
on ne pouvait pas trop les aider. Parce que
dès qu'ils arrivaient, ils étaient beaucoup
trop dans la merde, tu vois. Et les seuls outils qu'on avait c’était une table
de ping-pong, tu vois. Et moi, je ne pouvais rien
faire avec une table de ping-pong. Tu sais, des fois ils étaient là,
ils me racontaient leurs histoires : “Ouais, mon père il est
parti, ma mère elle est toxico.” Moi, j’étais là : “Ah ouais. C’est vrai que c’es
t difficile. Ouais. On va faire un
ping-pong si tu veux ?” J’étais là : “Bah oui,
je sais que c'est difficile, ouais. Mais bon, là il y a 4-0,
il faut que tu t’accroches quoi.” Même moi j’ai galéré quand
je suis arrivé dans ce truc-là. Surtout les premiers jours. Parce que les premiers
jours pour un éducateur, c’est les jours où
tu dois te faire respecter. Et moi,
quand on me voit arriver, c'est vrai qu'on ne veut pas
me respecter tout de suite, quoi. Tu sais, on va
attendre 2-3 semaine
s. Et tu sais, il y a
un des petits, il est relou, il ne veut pas
prendre sa douche. Moi, j'insiste
pour qu'il la prenne. Il commence
à m'insulter, il dit : “Ouais, je ne vais
pas la prendre ma douche. Qu’est-ce que
tu crois gros porc ?” et tout. Et je ne te cache pas
que je l’ai mal pris, tu vois. Et tu sais, quand
tu es éducateur, tu ne peux pas lui mettre une gifle
et lui prendre sa douche, tu vois. Parce que ce n'est pas
légal, malheureusement, tu vois. Et de toute façon,
le temps
que ma gifle elle arrive, c'est devenu
un adulte, tu vois. Du coup
je lui explique, je lui dis : “Ecoute, la douche là,
c’est pour l'hygiène, tu pues. Et quand on s'appelle
Jean-Michel on ne fait pas le malin.” Et ça, il l'a mal pris. Il est parti de la maison,
tu vois, en courant en pleine nuit. Un enfant de 8 ans,
tu sais, c'est dangereux. Moi je vais le chercher parce que
je suis encore en période d’essai. Parce que pour moi, ce
n’est pas un enfant qui est sorti, c'était ma paye qui a
vait pris
la porte, qui était partie en courant. Donc du coup,
je me dépêche d’aller le chercher et j’ai juste le temps de mettre
mon pantalon, mais pas ma ceinture. Donc du coup, je galère
un petit peu à le rattraper. Donc du coup, je suis obligé
de lui tendre un piège, tu vois. C'est un village
qui tourne en rond. Il est obligé de
repasser devant moi, tu vois. Donc je me suis
caché derrière un arbre et dès qu’il est passé, je lui ai
mis une petite balayette, tu vois. Et là, il était pa
r terre,
il commence à crier et tout. Là, je l’attrape, et là,
tous les voisins, ils sortent, tu vois. Et tu sais, les voisins,
ils n’étaient pas là avant, tu vois. Tu sais, ils n’ont pas
l’histoire de l’hygiène, du respect, tu vois. Tout ce qu'ils ont,
c'est un Noir, tu vois. Sans pantalon. En train de traîner
un petit mec, tu vois. Qui était en train de crier : “Je ne vais pas la prendre,
je ne vais pas la prendre !” Et moi, j’étais là : “Si, tu vas la prendre,
mon gars, tout le monde l'
a prise.” Ouais, je n’ai pas
gardé le boulot, hein. Là, j'ai pris des nouvelles du
centre, il n’y a pas très longtemps. Ils sont tous en prison, hein. Mais au moins ils ont un
putain de niveau au ping-pong. Et je vais m’arrêter là-dessus. Merci de m’avoir
écouté, merci beaucoup.
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